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La vie sans voiture(s)

Brice Lalonde serviteur du faux (Rio 2012)

Brice Lalonde, Nicolas Sarkozy, Jean-Louis Borloo et Jean-Pierre Jouyet au Major Economies Meeting on Energy and Climate Change (MEM) de Paris le 18 avril 2008

Ce qui suit est une reprise d’un article publié mercredi passé dans Charlie-Hebdo. J’écris dans ce journal, oui. Entre autres. Et ce n’est pas de la pub, car cela dure depuis une année environ, et vous êtes assez grands pour savoir ce que vous voulez. Si je publie de nouveau ce texte, c’est qu’il annonce, je l’espère du moins, une mobilisation exceptionnelle contre le Sommet de la terre prévu en 2012 à Rio, vingt ans après celui de 1992. Ce qui se prépare, ce qui se jouera, c’est la parole publique légitime autour de la crise écologique. Il y a ceux comme Brice Lalonde, d’ores et déjà couchés devant le capitalisme vert, qui nous assure de nouveaux désastres. Et les autres, dont je suis. Puis-je vous demander de parler de tout cela autour de vous ? Je crois que se prépare un grand combat, une bagarre que nous ne pouvons pas perdre. Peut-on parler d’une priorité ? Il faut en faire LA priorité des prochains mois. Beaucoup ici se demandent quand et comment se lever ensemble. Voilà une occasion unique.

L’affaire semble crétine en diable, mais elle est si passionnante en vérité que l’on ne tardera pas à en reparler. Brice Lalonde, ci-devant écolo, sarkozyste de choc, vient d’être discrètement désigné par les Nations Unies pour organiser le Sommet de la terre 2012 de Rio, vingt ans après le premier. Et notre bon maître à tous n’est pas étranger à la combinazione.

Mais d’abord, un rappel rapide de la carrière d’un si gentil garçon. Écolo dans l’après-68, tendance PSU, Lalonde passe ensuite quinze ans à freiner l’émergence des Verts puis à tenter de les casser. Un beau travail d’expert. Ainsi, en 1984, il présente une liste aux Européennes contre les Verts, qui viennent de naître, en compagnie d’un ancien ministre de droite, le sublime Olivier Stirn. Comme il est élu de Normandie, ce dernier est également appelé « L’andouille de Vire ». Serait-ce une allusion ?

En 1989, Mitterrand appelle Lalonde au gouvernement pour faire semblant de s’occuper d’écologie, mais surtout pour concurrencer les Verts, qui viennent d’obtenir 10,59 % des voix aux Européennes. Commence une époque épique pour Lalonde, qui monte avec Jean-Louis Borloo – lui-même – une grande opération de diversion connue sous le nom de « Génération Écologie » ou GE. Aux régionales de 1992, GE fait à peu près jeu égal avec les Verts, ce qui arrache des sanglots de joie au vieux Mitterrand, qui déteste l’écologie.

Lalonde est déjà reparti ailleurs. La gauche ne plaît plus au monsieur, qui appelle à voter Chirac en 1995, puis s’acoquine dans la foulée avec l’ultralibéral Alain Madelin. Madelin, c’est du lourd. Le 13 mai 1986, 15 jours après Tchernobyl, il déclare, alors qu’il est ministre de l’Industrie : « Dans cette affaire du nucléaire, il faut jouer la transparence. Il n’y a eu aucun maillon faible dans la sécurité des Français ». Presque aussi beau que le coup du nuage arrêté à la frontière.

En 1995, à peine ministre des Finances, il réclame une réforme des retraites plus radicale que celle de Sarko aujourd’hui. En 1998, ayant conquis le Parti Républicain, devenu Démocratie Libérale, il refuse de condamner Millon et Blanc, qui se sont alliés à Le Pen pour gagner les régionales à Lyon et Montpellier. Bien entendu, il soutient avec vigueur Bush et son intervention en Irak. Un sans faute.

Et notre Lalonde ? Il ne jure plus que par l’industrie, très grosse de préférence, et se désintéresse peu à peu de la politique. Il laisse tomber Génération Écologie, petite entreprise en difficulté, et disparaît de la scène. Jusqu’à l’été 2007, quand commence la belle mise en scène du « Grenelle de l’Environnement ». Coup de fil de son vieux copain Borloo, devenu chef cuistot à l’Élysée. Le ministre de l’Écologie lui propose un poste taillé sur mesure, celui d’« ambassadeur chargé des négociations sur le changement climatique ». Lalonde remonte en selle et parcourt le monde en avion pour préparer le sommet climatique de Copenhague, en décembre 2009, dont Sarkozy attend beaucoup.

Mais cela foire, et en grand. Les petits bras blancs du président n’ayant pas suffi à sauver le monde, Lalonde se retrouve à la tête d’un poste inutile. Fini ? Mais non, les amis ! Les réseaux élyséens s’agitent en coulisses pour une nouvelle manœuvre auprès des Nations Unies, qui vient de réussir : Lalonde va donc préparer officiellement le grand Sommet de la terre de dans deux ans, qui occupera une bonne part de l’espace médiatique au printemps 2012.

Tout cela relève-t-il d’un heureux hasard ? Euh, non : Sarkozy entend utiliser Lalonde pour montrer au moment des présidentielles, épaulé par un Borloo aux anges, que la droite est non seulement écologiste, mais aussi planétaire. Le coup marchera-t-il ? Pour l’instant, on s’en fout. Mais il faut ajouter deux ou trois bricoles sur l’arrière-plan des festivités de Rio. L’édition 2012 devrait consacrer pour un bon bout de temps le triomphe du « capitalisme vert ».

Qu’est-ce que c’est ? De la peinture. Du ripolinage. Ce qu’on appelle en Amérique du greenwashing, c’est-à-dire l’art éternel d’entuber le beau monde. Un, on lance sur le marché l’expression « développement durable », dont la vraie traduction est business as usual. Deux, on occupe les places qui comptent. Trois, on applaudit. De 1972 à 1992, du premier sommet de la terre de Stockholm à celui de Rio première manière, le grand organisateur de ces rendez-vous « écolos » s’appelait Maurice Strong, fascinant personnage lié de tout temps à l’industrie pétrolière. Adjoint du même dès la fin des années 80 : le Suisse Stephan Schmidheiny, alors patron d’une transnationale de l’amiante, Eternit, qui a tué les prolos par milliers. Lalonde s’inscrit à la perfection dans la tradition. Rio 2012 ? Un grand moment du faux.

Source: http://fabrice-nicolino.com/

Photo: Brice Lalonde, Nicolas Sarkozy, Jean-Louis Borloo et Jean-Pierre Jouyet au Major Economies Meeting on Energy and Climate Change (MEM) de Paris le 18 avril 2008.



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Un Commentaire, Commentaire ou Rétrolien

  1. François Carré

    Nous avons eu « l’honneur » de recevoir un courrier réponse sur un exposé concernant une nouvelle vision de l’éolien afin de prendre une orientation nouvelle, plus rentable.
    Soit ce « monsieur » a pris les choses du haut d’un prétendu savoir, soit, qu’il n’était pas apte de comprendre le sens des éléments évoqués.
    Il faut convenir que nous avons eu une réponse, ce qui en soit constitue un aspect positif, mais, la réponse était très éloignée de ce que l’on pouvait attendre d’un esprit supposé brillant.
    Il conviendrait que les politiques et assimilables, qui, normalement, sont nos représentants, et, à ce titre, ont des comptes à nous rendre, ne manifestent pas une condescendance vis à vis de leurs électeurs. Condescendance frisant d’ailleurs, hors périodes électorales, presque à du mépris.
    Avons-nous quelque chose de bon à en attendre ?
    Là est la question ?

    Il est peu probable que cet écrit apparaisse, mais, au moins, je crois que je ne fais qu’être le porte parole de beaucoup de gens.